Plaidoyer pour les coopératives d’habitation

OPINION / La crise du logement fait rage à travers tout le Québec. En 2021, le logement a été un enjeu majeur de la campagne électorale municipale dans toutes les grandes villes, et même dans les villes de plus petite taille. Au-delà des ménages à faibles revenus, c’est maintenant la classe moyenne qui peine à se loger dans le marché actuel. Or, le gouvernement possède un atout majeur dans son jeu, un atout méconnu, sous-exploité; souvent occulté par l’attention accordée aux autres modèles d’habitation : les coopératives d’habitation.

Cette lettre d’opinion a été écrite par les présidents et présidentes de huit conseils d’administration de coopératives d’habitation au Québec, soit Jacques Côté, Michel Duranleau, Jean-Claude Gingras, Christyne Lavoie, Michel Légaré, Michel Legault, Claude Pépin et Manon Rondeau.

On compte plus de 1 300 coopératives d’habitation, pour un total de 30 000 logements abritant quelque 60 000 personnes partout dans chaque région de la province. Ces 30 000 ménages bénéficient d’un logement de qualité à prix raisonnable, dans un environnement social d’entraide et de bienveillance.

 

Les coopératives d’habitation accueillent des gens de tout horizon

Le modèle coopératif offre des logements à prix abordable à des ménages ne pouvant bénéficier d’aide au logement. En ayant accès à un logement dans une coopérative d’habitation, ces ménages obtiennent un toit pour un prix bien inférieur aux loyers du marché privé. Le contrôle et la gestion réalisés par les membres sont des garanties de la durabilité du loyer abordable de ces logements communautaires. Par exemple, on trouve encore facilement des logements de deux (2) chambres à coucher pour 600$ dans de nombreuses coopératives du Québec parce qu’avec les années, les prix des logements coopératifs ont augmenté moins rapidement que celui des logements privés.

En appuyant le développement des coopératives d’habitation, le gouvernement atteint plusieurs objectifs. Il répond aux besoins des ménages en quête d’un logement abordable. De plus, il favorise l’accueil des ménages à faibles revenus. D’un point de vue comptable, le gouvernement qui offre des subventions aux loyers dans les coopératives fait une bonne affaire. Les loyers y étant abordables, le montant versé en subvention s’en voit d’autant diminué.

Les membres des quelque 1 300 coopératives d’habitation au Québec

Près du tiers des membres possèdent un diplôme universitaire. Quarante pour cent (40 %) sont salariés, et presque autant sont retraités. Le revenu moyen des ménages vivant en coopérative est de 32 000$ par année. Près de 20 % des membres ne sont pas nés au Canada. Près de la moitié sont des personnes vivant seules, dont 60 % sont des femmes. Il n’est pas rare de voir se côtoyer professionnels et ouvriers au sein de la même coopérative. En somme, le milieu coopératif reflète la société québécoise, avec peut-être un peu plus de femmes et de retraités. Le Mouvement coopératif se sent fier de la mixité qui nous distingue des autres modèles d’habitation. Nous considérons cette mixité comme une force, une façon d’illustrer la solidarité et le partage d’un milieu de vie composé de personnes engagées et responsables.

Les coopératives forment des citoyennes et des citoyens

Plus qu’un logement, la coopérative d’habitation est un milieu de vie et d’apprentissage. Apprentissage de la démocratie comme une valeur fondamentale du modèle coopératif. Apprentissage du vivre ensemble parce qu’il est impossible d’ignorer son voisin. Il faut travailler en équipe au-delà des différences de culture, de point de vue ou de revenu. Apprentissage de la gestion financière et immobilière de son milieu de vie comme un élément de grande responsabilité envers soi-même et les autres, sans oublier les générations futures qui viendront vivre dans la coopérative.

Les responsabilités entourant la gouvernance de leur coopérative et le fait de prendre soin de l’immeuble et de ses finances sont autant d’occasions de développer le sentiment du pouvoir d’agir (empowerment) chez chacun des membres.

Un modèle capable de traverser le temps

La coopérative d’habitation est un modèle à but non lucratif. La coopérative ne vise pas l’accumulation de profits, mais simplement la santé financière pour couvrir ses dépenses. La prise en charge par les membres résidents des nombreuses tâches diverses réduit le recours à du personnel rémunéré et permet ainsi de maintenir des loyers en deçà du prix du marché. L’écart avec le prix des logements privés se creuse avec le temps. Ainsi, les coopératives arrivées à 30 ans d’exploitation peuvent compter sur des loyers nettement plus abordables et continuer leur mission sans risque de revente ou de démutualisation. En effet, la loi sur les coopératives empêche toute vente de ces immeubles à des intérêts privés.

Un modèle sur lequel il faut donc miser

Pour toutes ces raisons et parce que les coopératives d’habitation se sont dotées de fédérations et d’une confédération qui les appuient, le modèle coopératif est une composante essentielle et avantageuse qui gagnerait à être davantage connu pour résoudre la crise du logement et cela de manière pérenne.

Investissons collectivement dans le modèle coopératif, pour les ménages, pour les citoyens et pour la collectivité !



16 Sep 2022

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